Épisode 5 : Bleu Tempête

Sous le pont des Catalans, la tension est à son comble. Les reflets de la Garonne dansent sur les visages tendus de Marius, Naïla, Mathieu, et Jonathan. L’homme au blouson de cuir avance d’un pas, son arme braquée sur eux, implacable. Autour de lui, ses hommes se déploient, des silhouettes menaçantes dans la nuit.

— Donnez-moi ces documents, répète l’homme, la voix glaciale. Personne n’a besoin de mourir ce soir.

Mathieu, toujours en alerte, évalue rapidement la situation. Ils sont en infériorité numérique, et leurs chances de s’en sortir indemnes semblent minces. Pourtant, il refuse de céder à la panique.

— Ces documents n’iront nulle part, rétorque Mathieu d'une voix empreinte d'une assurance feinte. Vous avez ce que vous vouliez, laissez-nous partir.

L’homme esquisse un sourire sinistre, visiblement amusé par l’audace de Mathieu.

— Vous ne comprenez pas, n'est-ce pas ? Ce n'est pas une simple négociation. Ces papiers... ils contiennent des secrets bien trop lourds pour que vous puissiez les porter.

Jonathan, tremblant, s'avance légèrement, ses yeux rivés sur ceux de l’homme.

— Si vous me tuez, tout sera révélé. J’ai pris mes précautions. Ces documents ne sont qu’une partie de ce que j’ai découvert. Vous ne pouvez pas me faire disparaître aussi facilement.

Un silence pesant s'installe, brisé seulement par le clapotis de l'eau sous le pont. L'homme au blouson de cuir scrute Jonathan, cherchant une faille dans sa détermination.

— Tu bluffes, murmure-t-il. Mais le doute semble s'insinuer en lui.

Un des hommes derrière lui, nerveux, jette un regard autour, comme pour s'assurer qu'ils ne sont pas observés.

— Faut qu'on en finisse, Max, souffle-t-il à son chef. On perd du temps.

Max, les traits tendus, semble hésiter. Son regard passe de Jonathan aux autres, puis aux documents. Il est à deux doigts de céder à la violence, mais un mouvement soudain dans l’obscurité attire son attention. Une silhouette élancée, tout de noir vêtue, émerge de l'ombre du pont. Nora Caral apparaît comme un spectre dans la nuit, son visage impassible mais ses yeux brillants d’une intensité glaciale. Le silence se fait, chaque protagoniste retenu par cette apparition inattendue.

Nora s’avance lentement, ses pas à peine audibles sur le gravier.

— Laissez-les partir, Max, dit-elle d’une voix calme mais autoritaire.

Max fronce les sourcils, surpris de la voir ici.

— Nora... Qu’est-ce que tu fais là ? C’est notre affaire, tu n'as rien à faire ici.

— Tu sais bien que ce n’est pas aussi simple, réplique-t-elle. Ces documents ne doivent tomber dans les mains de personne. Laissez-les partir et nous trouverons une autre solution. Si tu les tues, tu déclencheras une guerre que tu ne pourras pas contrôler.

Max semble peser ses options. Il connaît Nora, et sait qu’elle n'est pas du genre à parler en l’air. Les hommes derrière lui échangent des regards inquiets. Finalement, il baisse son arme, faisant un pas en arrière.

— Très bien, lâche-t-il à contrecœur. Mais sache que ça ne s’arrêtera pas là. Vous êtes tous dans le collimateur maintenant. Et personne n’en sortira indemne.

Il fait signe à ses hommes de se retirer, et dans un dernier regard de défi, disparaît dans la nuit, suivi de ses acolytes. Le groupe reste figé un moment, la tension retombant lentement. Nora s'approche d’eux, son expression toujours aussi indéchiffrable.

— Vous ne devriez pas rester ici, dit-elle d'une voix douce. Suivez-moi, je connais un endroit où vous serez en sécurité pour le moment.

Sans attendre de réponse, elle se retourne et commence à marcher vers une rue adjacente. Marius, toujours sous le choc, est le premier à réagir.

— On la suit ? demande-t-il à voix basse, les yeux fixés sur la silhouette de Nora.

— Oui, acquiesce Mathieu, se redressant. Elle semble en savoir beaucoup plus que nous.

Jonathan serre les documents contre lui, l’air encore plus tourmenté qu’auparavant. Naïla lui adresse un regard encourageant.

— On va s’en sortir, Jonathan. Je te le promets.

Ils emboîtent le pas à Nora, quittant les rives de la Garonne pour plonger dans les rues étroites et sinueuses de Toulouse, la peur au ventre mais résolus à comprendre l’ampleur du danger qui les entoure.

Café La Muse du Matin

Les premiers rayons du jour filtrent à travers les vitres du café. Claire est derrière son comptoir, ses gestes automatiques, perdue dans ses pensées. Le journal du matin est posé à côté d'une tasse de café fumante, mais elle ne l’a pas encore ouvert. Un pressentiment l’assaille depuis qu’elle a entendu parler de la disparition de Jonathan. Elle se demande si Mathieu a avancé dans son enquête, si ces jeunes qu’elle connaît à peine sont en sécurité. La clochette de la porte tinte, la faisant sursauter. Emy entre d'un pas vif, le visage marqué par une nuit sans sommeil. Claire lui adresse un sourire fatigué.

— Toujours aussi matinale, Emy.

— Je n’ai pas fermé l'œil de la nuit, avoue l’avocate en se laissant tomber sur une chaise. Le café noir, comme d'habitude.

Claire s’exécute, posant la tasse devant Emy.

— J'ai croisé Mathieu hier, reprend-elle. Il semble être sur une piste, mais il n’a pas voulu m’en dire plus. Tu as du nouveau ?

Emy soupire, portant la tasse à ses lèvres.

— Jonathan est en grand danger, Claire. Et pas seulement lui. Nous sommes peut-être tous en danger. Je ne sais plus qui je peux vraiment croire.

Claire la regarde avec gravité, réalisant que la situation est bien plus sérieuse qu’elle ne l’avait imaginé. Un long silence s’installe entre elles, rempli de non-dits. Soudain, la porte du café s’ouvre à nouveau, laissant entrer une silhouette que Claire ne connaît que trop bien : Antho. Le visage sombre, il se dirige directement vers leur table, sans même saluer.

— Je dois vous parler, Emy. C’est urgent.

La tension dans sa voix ne laisse aucun doute sur la gravité de ses propos. Claire, sentant que ce qui va être dit dépasse de loin les discussions ordinaires, se retire discrètement, les laissant en tête-à-tête.

— Qu'est-ce qui se passe, Antho ? demande Emy, inquiète.

— J'ai des informations sur l’homme qui traque Jonathan. Mais ce que j'ai découvert... c'est bien pire que ce que nous pensions.

Emy fronce les sourcils, ses mains se crispant autour de sa tasse.

— Quoi donc ? Parle.

Antho se penche en avant, murmurant comme si les murs eux-mêmes avaient des oreilles.

— Cet homme, Max, c’est pas juste un mercenaire. C’est un pion dans une partie bien plus grande. Ça remonte à des affaires qui touchent des gens très haut placés. Jonathan est dans leur collimateur parce qu’il a mis le doigt sur quelque chose qui pourrait faire tomber des têtes. Si on n'agit pas vite, il pourrait disparaître... pour de bon.

Le visage d'Emy se ferme davantage, et elle comprend que leur mission vient de prendre une nouvelle dimension.

— Il faut qu'on trouve un moyen de les arrêter, avant qu'il ne soit trop tard.

À suivre…